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Mois : février 2014 Page 2 of 3

Sautons ailleurs plutôt qu’ici

 

Détester la gravité c’est encore trop s’attacher à la réalité, c’est encore être soumis aux lois environnant une identité que nous devrions tant réfuter que nous laisserions notre corps à l’abandon, offert aux nécrophages, aux esprits qui inclinent à posséder plutôt que jouir de leur nature éthérée. Il faudrait – par la simple volonté ou par une simple crédulité croyante – frapper le sol et s’envoler parmi les oiseaux migrateurs, parmi les nuages et les eaux de la Supermer des Sargasses, parmi les majestueuses aurores boréales, parmi de déments voyageurs en ballon et les extraordinaires voyageurs en obus en partance pour d’autres astres, parmi les secrets des vides interstellaires, parmi les vérités d’au-delà de la nuit spatiale…

Franz Reichelt, le Club de Curiosités vous salue, nous savons qu’il faut diffuser le film de votre saut dans le sens où vous vous élevez et non celui où vous vous écrasez pathétiquement (mais merveilleusement). Votre tentative est le commencement de la dignité.

 

L’histoire déjà connue

« Connaissez-vous l’histoire de ces vampires inversés qui n’existent que dans les reflets mais n’ont pas d’autre existence?

– …

– Eh bien, répondez! Voulez-vous que je vous la raconte?

– …

– Parlez!

– Mon cher, nous sommes des personnages imaginaires, nous pourrions voguer sur des océans éthérés, parler à une substance stellaire pure et parfaite, blasphémer les lois de la réalité ou même nous contenter de chercher des fantômes dans un antique château à moitié en ruines, savourer un alcool inconnu dans un castel fantaisiste, déterrer des cadavres pour les entasser en sculptures décadentes avant de les offrir en holocauste à une divinité païenne qui nous remercierait en nous livrant un secret indicible, nous pourrions nous aventurer dans un temple pré-humain où nous découvririons des bas-reliefs qui auraient raison de notre conscience et de nos existences, nous pourrions emprunter des engins extravagants pour partir vers des contrées exotiques, hostiles ou oniriques, nous pourrions être dans l’ineffable, le sublime putride, le merveilleux le plus opiacé, les ténèbres les moins opaques qui se puissent concevoir, mais non… Il faut que vous désiriez conter une histoire de vampire qui ne serait qu’une métaphore de la superficialité humaine… Vous n’êtes pas mieux que toutes ces putains qui copulent avec la moindre distraction dans l’espoir de ne pas avoir à s’affronter soi-même ni se transcender. Ce n’est pas parce que vous éprouvez du plaisir à cracher sur tout que vous n’êtes pas attaché à tout.

– Zut, vous la connaissez déjà alors cette histoire de vampires ? »

Le robinet est bouché par un caillot

Fantaisie hongroise :

Sur son mont offert aux vents, un château esseulé autour duquel les loups hurlaient tandis que le soleil rougeoyant s’était abîmé à l’ouest. On entendit hurler à travers les corridors :

« Katarina, vas prendre ton bain!

– Mais maman… il n’y a plus de sang!

– Tu te fiches de moi? Tu es assez grande pour toi-même ordonner à ta sorcière d’ouvrir les veines d’une jeune servante, je ne serai pas toujours là pour toi, je ne suis pas éternelle. Ah ah ah, mais si je le suis! Donne-moi ma lame. »

 

Irréflexion réflexe

 » Vous savez, vous n’avez pas besoin de parapluie lorsque vous portez une tenue de scaphandrier.

– Il pleut donc j’ouvre mon parapluie, un point c’est tout. Si on doit commencer à se poser des questions à chaque fois on n’en finit plus!

– En somme vous avez acquis une manière d’irréflexion réflexe.

– Hein! Oui? Non? Je sais pas, moi en tous cas quand il se passe quelque chose je fais comme on m’a appris. Je ne réfléchis pas moi, je suis pas un miroir. Ah ah! Comme les vampires qui ne réfléchissent pas.

– Hum, ne sont-ce plutôt les miroirs qui ne réfléchissent pas l’image des vampires? »

 

Nadar, catacombes, lien

http://elisandre-librairie-oeuvre-au-noir.blogspot.fr/2014/02/1860-les-catacombes-de-paris-par-nadar.html

Accrochez-vous, vous êtes de l’autre côté de la Terre

Lorsque l’on fait le tour de la Terre on se retrouve forcément sur l’autre face de notre bonne vieille planète plate autour de laquelle tourne le Soleil. Quiconque prétendrait le contraire, ou étudierait les astres, la longueur des ombres selon la latitude, ou s’interrogerait sur la Lune, finirait au bûcher!

 

… Il voulait voyager parmi les étoiles donc il est allé sur l’autre face de la Terre et s’est laissé tomber.

 

 

Nuits ensoleillées

A quoi bon apporter la lumière à quiconque puisque tous sont aveugles ?

La raison a beau doter beaucoup de personnes, elle représente pour chacun bien peu comparé à leur morale, leurs habitudes, leurs sentiments et volontés grégaires, leurs bas hédonismes, leurs orgueils. La raison a un temps d’effet de quelques secondes, parfois quelques minutes, autant qu’un bain avant de retourner à la porcherie.

Quand on s’éclairait à la bougie au moins pouvait-on espérer que dans les angles ténébreux se cachait une valeur inconnue. Désormais tout est mis à jour, et pourtant rien n’a jamais été aussi sombre. L’âge des lumières, l’âge industriel… toujours l’âge des cavernes enténébrées dans les replis du cerveau, l’âge d’une immense caverne.

Les psychiatres, psychologues, psychanalystes, philosophes, ne répandent que des aveuglements, pareils à des vendeurs de clefs dans un monde où les portes n’ont aucune serrure, les clefs sont là mais ne servent à rien ni à personne, pourtant tout le monde fait tinter avec arrogance le métal ouvragé dans sa poche comme si c’était lui qui avait tout ouvert et pouvait tout fermer.

Chapitre X de Se tenir sur le brouillard

 

Las

Que je suis fatigué, que je suis fatigué du plaisir et toujours du plaisir, de l’ennuyeux plaisir! Ah! J’aimerais qu’il y eût la guerre!

Le chevalier du château de Durande

 

 

Aujourd’hui celui qui, connaissant le monde et l’ayant pratiqué, n’est pas devenu égoïste, pour peu qu’il ait un rien de sens et d’esprit, ne peut qu’être devenu misanthrope.

Léopardi, 1821

 

 

 

 

Toutes les portes nous sont ouvertes. Si seulement nous n’étions tous tétraplégiques…

 

 

Ruines dans l’âme

We’re too old, too cold

Et si le but de la vie était de produire de futures ruines sur les ruines du passé?

 

 

 

Faisons comme d’habitude : pensons dix ou onze secondes et reprenons le cours normal de nos vies. Nous sommes des êtres raisonnables, donc nous ne raisonnons pas, nous agissons. Les ruines seront tout autour de nous, à l’intérieur nous n’aurons qu’un désert et du sable plein la tête, un sablier sans goulot, une pensée atemporelle parce qu’inexistante, de quoi produire des mandalas aléatoires au gré des turpitudes de nos divagations, parce qu’il faut bien se figurer les dunes absurdes qui chuintent dans notre boîte crânienne être le fruit de belles choses plutôt qu’être lucide, plutôt que plonger en soi et se retrouver nulle part, sublimer l’illusion d’être foisonnant tandis qu’on n’est qu’une source de poussières.

Le crépuscule des dieux

Je suis retourné à ce castel perdu par-delà les brumes et des monts vaporeux, cet étrange château à l’architecture impossible dont les donjons crèvent un firmament toujours nocturne laissant pleuvoir des rêves et des infinis.

Passant la grande entrée je remarquai que les musiques éthérées ne résonnaient plus comme naguère. Plus rien sinon les murmures de vents sinistres et moribonds.

Les tentures rongées par les insectes, les fresques décapées, les lits aux colonnes et aux baldaquins effondrés, les glaives rouillés, les armures écroulées, les verreries brisées. Même les fantômes ne glissaient plus dans les corridors dont les fenêtres ne laissaient plus paraitre qu’un horizon stérile, banal et terne.

Dans la salle du trône pourtant le portrait animé était encore vivant, du moins non mort; gluant cadavre dont la représentation hésitait entre la putréfaction et le pourrissement.

« Où sont donc passés les monarques de ce royaume ? demandai-je.

– Partis, siffla-t-il par les trous de vers percés dans sa gorge.

– Partis ? Partis, mais où ça ? Pourquoi ?

– Ils ont échangé leurs sceptres d’empereurs et leurs trônes de dieux pour des couronnes et des distinctions d’autres temps, de temps modernes.

– Blasphèmes !

– Nul blasphème, seulement la vérité. Le tissu onirique s’est rompu, désormais les champs féériques seront des habitats pour automates, désormais les écritures serviront à ordonner le prosaïque, désormais les sources magiques n’alimenteront plus les herbes veloutées et possédées mais seulement les moulins brassant des vents d’artifices concrets, désormais la Lune et le Soleil suivront leur course sans aucun maître, désormais le nombre de constellations restera fixe sans plus aucun démiurge pour en enfanter dans le chaos, désormais les cimetières seront calmes et inhabités, désormais les créatures des grottes seront des fantaisies de dupes, désormais les sorcières apprendront des métiers qui ne font appel qu’à la science, désormais les chênes vivront muets et au service de l’industrie, désormais les loups symphoniques ne chanteront plus, désormais les corbeaux ne porteront plus aucun message dans leurs ricanements, désormais les statues seront offertes aux affres les moins purs.

 » Les dieux ne meurent pas, ils se décomposent aussi indignement qu’ils ont été grands, tels des fragments de digestion dans une fumière, anodins miasmes, pas même des feux follets, tout juste des puanteurs incolores, prêts à fertiliser les labours d’une réalité aux fruits amers et pestilentiels. L’équilibre même dans un désastre sans extase. »

 

Du cyanure dans le système limbique, enténébrer l’esprit par une lumière froide. Qu’as-tu construit dans ton esprit sinon des ruines inhabitées de toi?

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