Ces faquins de nains grouillaient derrière la porte. J’entendais leurs petits poings gras s’abattre sur le bois, leurs voix filtrées par leurs cordes vocales insolites, naguère cocasses, vociférant désormais de sinistres insultes et des promesses funèbres à mon adresse.

Tirant quelques pierres du pied pour les ramener vers moi, je les calais sur le seuil puis je fuis. D’abord je grimpai la muraille espérant ainsi prendre de l’avance, mais c’était sans compter sur l’agilité des diables à mes trousses. Alors je profitai d’une corniche naturelle dont je savais qu’elle gagnait l’un des encorbellements du château avec pour mauvaise – mais seule – idée de regagner les délétères labyrinthes dont je tentais pourtant de m’éloigner, car que faire sur cette île aux dimensions absurdes, cette île sans côte et sans rivage, cette île où, de l’horizon bouillonnant aux plus obscurs puits, tout n’est teint que dans cette couleur jaune et sale à laquelle aucun individu sain d’esprit ne peut croire ?

En brisant le vitrail je crus, un fugace instant, percevoir une silhouette féminine, portant une robe de velours cramoisi, certes terne et lourdement brodée d’ocre pâle, néanmoins quelque chose comme une couleur divertissante, et cela suffit à mon faible cœur pour s’emplir de lamentables espoirs. Dans quelles affres de niaiseries et d’afflictions peut-on sombrer lorsque l’on se retrouve captif ! Quelles erreurs de commet-on pas lorsque…

J’écrivais ceci lorsque je me paralysai : « Mais de qui parlé-je en disant je ? »

Je cessai ma lecture en m’interrogeant : « Mais pourquoi me récité-je une mésaventure à la première personne du singulier alors qu’à moi il ne pourrait rien m’arriver de tel ? Je pourrais me sauver de ce mauvais pas tout simplement en cessant de lire. »

Si un auteur c’est un monde piégé dans un individu, est-ce qu’un lecteur ce n’est pas un intrus ?

Qui a imaginé le personnage que vous êtes ?

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