« Voilà, mes chers enfants, tout ce qu’il y a sur la table est pour vous. »

Et tous les orphelins de se passer leur crasseuses manches sur leur nez morveux d’un air sceptique mais avide, eux qui n’ont l’habitude que des gifles, des porridges gluants et des brimades parfumées à l’haleine fétide.

L’un d’eux, plus audacieux, fit un pas en avant et tendit son cou crasseux pour humer les soldats de plomb parfumés au pain d’épices.

« Vilains ! vous avez tous été vilains ! vociféra le syphilitique en sortant un gros maillet de la boucle de sa ceinture.

Je fis de même lorsqu’il commença à détruire la montagne de cadeaux que nous avions apportée.

« Doucement, Henry, m’admonesta-t-il d’une sévère voix d’expert. Ne vous concentrez pas sur votre labeur, il n’est que secondaire, levez un peu la tête pour les voir tous pleurer. Oh ces visages hideux embellis par la rage, la tristesse et le désarroi… Ohen, jouit-il.

Aucun ne hurla, aucun ne brailla, aucun n’esquissa le moindre geste pour nous empêcher d’agir.

« Vous savez que vous n’avez pas été sages, s’apitoya le syphilitique en mimant une approximative empathique. C’est pour votre bien, vous le savez, n’est-ce pas !

Le cuistre ! La plupart s’étaient fait attraper alors que c’était lui qui avait loué leurs services, lui qui leur avait appris à voler, molester, terroriser…

« Oh, mais toi… fit-il en voyant une petite fille toute penaude. Oh mais toi je ne te connais pas. As-tu été sage cette année ?

– Mes parents sont morts, mon oncle me battait, je m’ai cassé le pied, et…

– Tututu, on dit « je me suis cassé le pied » ; et tu n’as pas répondu à ma question, vilaine. »

Et le syphilitique de reprendre la poupée de porcelaine qu’il venait de placer dans les petites mains de l’infortunée avant de la briser sur un coin de table et de lui jeter la dépouille de l’effigie.

« Tiens, prends, tu me fais trop de peine. »

*

« Ah, Henry, que c’est bon de faire le bien autour de soi. Allons, allons, hâtez-vous, c’est que j’ai un autre rendez-vous, moi, je suis un cœur pur très occupé, moi. Hier un arrogant m’a expliqué qu’un gentleman doit toujours avoir du feu sur lui quand je lui ai demandé de quoi allumer ma cigarette… Je ne suis pas un voleur, je vais la lui rendre sa flamme qu’il m’a prêtée de bien mauvais gré. Avoir du feu sur soi, il va voir ce que cela signifie d’après moi ! Du feu sur lui, ah du feu sur lui, oh que oui il va en avoir, maugréait-il en jouant avec la flasque d’alcool.

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