Il ne cessait de se lamenter, clamant « Pourquoi les pierres ne sont-elles que des pierres ? Pourquoi derrière l’horizon ne git qu’une éternelle répétition ? Pourquoi le mystère n’est-il qu’un abîme d’ignorances derrière un rideau face auquel tout le monde s’extasie sans oser se révéler la décevante vérité ? ».

Il ne cessait de blâmer toute chose. Pour lui l’esprit humain n’était qu’une somme neuronale finie et trop limitée pour être digne d’intérêt, les dieux étaient trop peu nombreux pour esquisser le moindre espoir que ce soit, la métaphysique était aussi basse et aisée à gravir qu’un gravillon le serait pour un alpiniste chevronné. « Les plantes ne sont que des plantes, les animaux ne sont que des animaux ; aucune âme, aucune beauté. Les lacs sont de vieux nuages morts qui ont fini par se dissoudre, les océans en sont les égouts. La quête esthétique prouve que rien n’est beau. L’art c’est une matière violée afin de correspondre à une époque qui la quantifiera à l’aide de pièces de monnaie absurdes. Les charmes féminins sont soulignés pour détourner l’attention de leur vacuité, et cela convient bien aux vains hommes qui trouveront des mains douces et baguées à tenir sur la route de l’illusion qu’ils ne sont pas aussi creux que tout ce qui les entoure. »

Pour lui il n’y avait aucun espoir, la surprise était interdite, l’étonnement était un mensonge, la curiosité était une forme de décadence. L’avenir aurait le même fond que le passé, et qu’il en ait la même forme ou pas, qui s’en rendrait compte ?

 « Même ce chien qui se reflète dans ce miroir ne vaut rien » aboyait-il lorsqu’il croisait son image. C’est le seul point avec lequel je n’étais pas d’accord avec lui.

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