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Étiquette : misanthropie Page 3 of 5

Dieu? Si tu m’entends fais en sorte que je puisse me moquer

« Hommes approchez. »

Et Diogène frappa ceux qui étaient venus en disant :

« J’ai demandé des hommes pas des excréments. »

Tiré de Vies imaginaires de Schwob.

Venez voir, mon cher ami ! Hier j’ai prié Dieu pour que tout le monde soit aveugle, et aujourd’hui, voyez, mon vœu est exhaussé. Venez, venez, plus personne ne sait lire ! S’il vous fallait une preuve de plus que Dieu m’écoute et m’obéit…

Les scientifiques cherchent toujours l’étrange force gravitationnelle qui semble faire que les humains ne peuvent vivre à distance raisonnable les uns des autres. La prochaine étape de son évolution sera-t-elle une agglutination de chairs et de gémissements ou bien quelque chose comme un individu capable de penser? Tout est possible… Οἱ πλεῖστοι κακοί

« Il n’y a plus de saisons.

– Qu’est-ce qui vous fait dire ça?

– Les arbres de cette immense forêt ne sont plus jamais en fleur.

– Ce ne sont pas des arbres mais des immeubles!

– Mais il en pousse de partout… »

Braire ou ne pas braire, tel est l’ânonnement

… Et comme l’a dit Albert Lhermite (qui qu’il soit, restons sceptique à propos de son identité) :

« Hi-an Hi-an », il n’en faut pas davantage pour ne pas affirmer quelque chose de faux tout en se faisant entendre. Deux syllabes répétées. Mais non, allez savoir sous quel effet de la sélection naturelle certains ânes ont acquis des cordes vocales et une apparence simiesque pour se tromper en usant de maintes sonorités complexes.

Lucien Cuénot (enfin non, pas vraiment, pas du tout même, mais qu’importe)

Et parce que ne soyons pas fous, soyons symbolistes, voici :

…Car l’homme et l’âne sont les deux fragments d’un même symbolon  cosmique, les deux feuilles automnales de l’Yggdrasil karstique, les deux narines d’Adonaï, les deux nombrils de Bouddha.

Ô âne, comme ton chant claironne dans les brumes stellaires sombrant à l’aurore pour métamorphoser le bourrin en bourrique et la bourrique en bourrin. Pour toi, toute ma liberté, pour celui en qui tu te mues (toi, manière de lycanthrope équidé), toute ma curiosité sub-sélène.

Avez-vous parlé à un âne en fermant les yeux ? L’on dirait un affranchi mâchant des dents.

Oeuvre aux poils

Saviez-vous que si vous mélangiez à parts égales de l’ineptie et de l’hédonisme de bas-étage vous obteniez un embryon humain?

Recette offerte par Les misanthropes non-anonymes initiés à l’alchimie du petit mou

(Quant à moi je tiens à préciser : tout le monde est médiocre sauf vous qui lisez ceci, bien évidemment. Vous, vous êtes formidables, merveilleux, excellents, purs, des joyaux, des anges, des fleurs, des soies, des fils dentaires, des aroïdées verdâtres, des onguents célestes parfumés, des marteaux en cire d’abeille, du goudron purpurin, des moustaches de chat lascif, des dents de nuages, des rouages de violon, des opéras wagnériens, des gourmes purulentes, des colombes coquebines, des aromates étrusques, des litotes de mescaline, des piles mésopotamiennes, des rais de lumières bleutés dans de l’eau de rose, des os prismatiques, des impératrices et des empereurs de la huitième mer des alcaloïdes. Tout le monde est affligeant mais vous, vous! ah vous… vous êtes des paillettes d’harmonie dans le firmament ivre de douceurs orientales, vous êtes des lotus dont personne ne voit la subtile et décadente beauté, vous êtes l’indicible de mes rêves, l’infrangible statue de l’excellence taillée dans de l’onyx divin, le dictionnaire de l’estimable et de la cupidité, la définition du terme dégoulace, l’étoile sans nom qui glisse du septentrion au nord en passant par là où pointe l’aiguille aimantée baignant dans l’huile de foie de marsouin d’une boussole en os de salade de gallinacés.)

 

Saviez-vous que vous lisiez ceci?

Comment allez-vous?

« Comment allez-vous mon cher ami?

– Oh vous savez… J’ai un emploi stable, une belle carriole pour toute la famille, des tas d’amis semblables à moi (et réciproquement), je pratique un sport fort couru et bien en vue. Je suis assez impliqué dans les manifestations contre cette nouvelle loi zm2od5sig. Je suis allé voir cette nouvelle pièce à la mode avec ma femme à qui j’ai offert une robe dernière mode avec des bijoux bien clinquants, le visage proprement poudré, du parfum bien fort… J’ai réalisé de forts beaux investissements et je suis en passe de devenir presque riche après m’être tant soucié d’économiser; mais attention! je ne vais pas non plus cesser de m’occuper de payer peu et de pinailler et de marchander. Je me suis fait installer le téléphone à domicile! Non seulement pour rester en contact avec mes innombrables connaissances mais aussi parce qu’il faut vivre avec son temps, être à la pointe. Je n’ai plus le temps de rien, du moins pas le temps de m’ennuyer. Je suis en vie, et la vie est belle.

– Je ne vous savais pas aussi mal en point mon pauvre. »

C’est toujours de pire en pire, soit disant. Le monde ne tourne pas rond, soit disant. Et pourtant de tout temps on peut voir la couleur des dents de chacun puisque tout le monde sourit.

Tous ces médicaments émétiques sous formes de livres que sont les autobiographies romancées typiquement françaises, les articles publiés dans les journaux, c’est peut-être cela qui passera à un esprit solitaire et idéaliste pour de la vraie littérature fantastique, davantage que les fantômes, les vampires, les sorcières, les tapis volants, les maisons sur pattes de poules, les bains de sang, les chaudrons de poisons, l’alchimie, les cosmogonies éthérées, les voyages dans le cosmos, les aventures oniriques…

C’est le quotidien le plus banal qui parait fantastique à celui qui vit dans ses rêves. La Dark Fantasy, il est si facile d’en trouver, partout hors de l’imaginaire optimiste il n’y a que ça.

 

*

*

Je ne suis pas un être humain – c’était une erreur de me croire chose aussi minable.

L. Klima

Créer rend misanthrope et fou

« Mon mari fréquente les maisons closes. D’accord. Oh, ça ne me dérange pas, comme ça ce n’est pas moi qu’il importune avec sa risible virilité, si vous voyez ce que je veux dire. Mais il m’a confié qu’il a croisé mon père louant les services d’une jeunette qui me ressemblait « trait pour trait, en moins décatie » a-t-il jugé bon de préciser. Quand j’ai appris la nouvelle j’en ai laissé ma poêle tomber sur mon sol tout juste lavé – vous savez cette poêle achetée lors de l’exposition d’avril quand mon cousin avait eu un ongle incarné et que c’était le docteur Charles, le frère de l’épicier du cousin de votre ami Alphonse, qui l’a soigné avec un onguent indien miracle venu des Amériques. Alors toute la nourriture s’est répandue par terre, un beau sauté de pommes de terres trouvées sur le marché de T. où le pauvre Lulu qui a une patte folle et des soucis de voisinage…

– Que je fus sot !

– Sot ?

– Oui, sot ! Naguère, dans mes mauvais jours j’aurais prétexté un rendez-vous pour fuir vos monologues, dans mes meilleurs jours je vous aurais traitée de mégère en décampant, j’aurais ainsi été libre d’aller dessiner dans mon carnet avec pour seules rencontres des personnages imaginaires dans des paysages oniriques, j’aurais créé plutôt que subir.

«  Désormais je ne comprends plus celui que j’étais, le solitaire insolent qui ne supportait ni les commérages, ni les défécations politiques ni les logorrhées émétiques religieuses. Avant je n’avais pas envie de faire partie de quelque société que ce soit, seulement de la mienne et de celle de mes créations. Comment donc pouvais-je supporter d’être un artiste qui faisait passer ses créations avant ceux qui font le monde, avant vos si intéressants monologues, vos cocasses potins, vos hypnotiques ragots ? Avant je brassais des rêves en laissant ces vents inféconds passer avant mon emploi qui m’aurait permis de manger à ma faim, de me loger, et surtout d’occuper mes pensées, de me faire des amis, d’enrichir mes connaissances pratiques plutôt que spirituelles et égoïstes et intérieures.

«  Je vous en prie, continuez, parlez-moi de votre sœur encore vieille fille à 22 ans et qui ne trouve aucun mari mais seulement de lâches fiancés, parlez-moi de votre porte qui grince et qui ferme mal, parlez-moi des tissus qui étaient plus solides jadis, parlez-moi des saisons trop tardives, parlez-moi des injustices, des tricheries, des mesquineries et des mensonges politiques, parlez-moi de religions et de ces pimbêches qui vous ont volé vos places à la messe, ou de la délurée Lady C. qui doit encore une fois avoir oublié de se signer au bénitier, parlez-moi des amis de votre mari, de vos amies à vous, de celle qui copie votre style vestimentaire. Parlez-moi. Parlez-moi de tout pour m’empêcher de retourner à mon cahier et à mes armes chargées à l’encre, car sinon je crains d’un jour m’y perdre, y disparaitre, ou du moins de mourir ici et ne plus pouvoir rien être pour vous tous, devenir un moins que rien, et sombrer dans un parfait mépris pour vos jugements. De la futilité, de la niaiserie, de la sottise, tout ce qui fait l’humanité, du sarcasme mais surtout aucun digne cynisme, de la pose de dandy mais pas de fougueuse folie, j’en ai besoin de toutes ces choses prosaïques et banales, car même mon cahier brûlé je sais que je graverai mon inspiration sur le sable ou les troncs ou mes tables, je… Parlez-moi des merveilles de votre vie, de tout sauf de créations éthérées.

– Je crois comprendre.

– Vraiment ?

– J’ai eu un cousin éloigné qui était comme vous, les manches sales de peintures et d’encre, la peau diaphane et laiteuse de ne pas voir le soleil, laissant derrière lui un sillage de puanteur et de moisi, les manières brusques et impatientes de solitaire, un œil hautain et l’autre hostile, l’air affligé dès que les lèvres de qui que se soit vont pour s’ouvrir.

– A-t-il réussi à ne pas se perdre dans ses créations ? A-t-il fini par vivre comme vous tous, et à y prendre plaisir ? Prendre plaisir à manger des plats sans saveur imaginaire, à s’asseoir dans un lieu réel plutôt que parfaitement onirique, à s’abîmer avec délectation dans l’écoute du sordide quotidien, à participer à la grande représentation commune, à s’y trouver compagne satisfaisante, à avoir goût aux danses sur des musiques fades, à prendre plaisir à aller regarder des pièces de théâtre reproduisant la vie réelle ?

– Dans un sens oui, il a réussi à ne plus pouvoir créer et ne risque plus de se perdre dans ses créations : on l’a fait enfermer à l’asile pour les fous et il porte toujours une camisole de force. »

Pour paraphraser je ne sais qui : levons-nous tristes, couchons-nous en colère, et entretenons nos haines telles des frontières infranchissables que le temps et la matière ne peuvent violer. Martelons les cervelles (surtout la nôtre) pour préserver la sainte folie.

Nuits ensoleillées

A quoi bon apporter la lumière à quiconque puisque tous sont aveugles ?

La raison a beau doter beaucoup de personnes, elle représente pour chacun bien peu comparé à leur morale, leurs habitudes, leurs sentiments et volontés grégaires, leurs bas hédonismes, leurs orgueils. La raison a un temps d’effet de quelques secondes, parfois quelques minutes, autant qu’un bain avant de retourner à la porcherie.

Quand on s’éclairait à la bougie au moins pouvait-on espérer que dans les angles ténébreux se cachait une valeur inconnue. Désormais tout est mis à jour, et pourtant rien n’a jamais été aussi sombre. L’âge des lumières, l’âge industriel… toujours l’âge des cavernes enténébrées dans les replis du cerveau, l’âge d’une immense caverne.

Les psychiatres, psychologues, psychanalystes, philosophes, ne répandent que des aveuglements, pareils à des vendeurs de clefs dans un monde où les portes n’ont aucune serrure, les clefs sont là mais ne servent à rien ni à personne, pourtant tout le monde fait tinter avec arrogance le métal ouvragé dans sa poche comme si c’était lui qui avait tout ouvert et pouvait tout fermer.

Chapitre X de Se tenir sur le brouillard

 

Las

Que je suis fatigué, que je suis fatigué du plaisir et toujours du plaisir, de l’ennuyeux plaisir! Ah! J’aimerais qu’il y eût la guerre!

Le chevalier du château de Durande

 

 

Aujourd’hui celui qui, connaissant le monde et l’ayant pratiqué, n’est pas devenu égoïste, pour peu qu’il ait un rien de sens et d’esprit, ne peut qu’être devenu misanthrope.

Léopardi, 1821

 

 

 

 

Toutes les portes nous sont ouvertes. Si seulement nous n’étions tous tétraplégiques…

 

 

Soyons des chiens photogéniques

 » Puisque je vous assure que j’ai vu des pigeons avec des appareils photographiques.

– Cessez donc de boire cette eau-de-vie que vous distillez à partir de pierres, elle vous rend plus fou que de l’absinthe.

– Les voici, les voici, les pigeons!

– Damnation, ce ne sont pas des pigeons, ce sont des japonais.

– Non pas des japonais, mais des pigeons. Des pigeons ou… des humains. Comment savoir?

– Damnation, que la damnation soit damnée! Vous avez raison. Il faut dire qu’entre ces rats volants que sont les pigeons et ces rats terrestres que sont les humains il y a de quoi se tromper.

– Je le répète sans cesse, votre misanthropie vous étouffera!

– En effet ma chère Tite, mais quand une espèce toute entière me traite de fou parce que je parle à une chienne alors qu’ils sont eux-mêmes bons à enfermer puisqu’ils se parlent entre eux, je n’y peux rien, je les hais. Et désormais les voir avec ces appareils photographiques dans lesquels,… voyez, voyez! Ils parlent à leurs appareils photographiques, et désormais de leurs index ils tapent dessus en souriant. Oui, il faut vraiment que je parte loin.

– Et comment allez-vous faire?

– En fiacre ou en train, je ne sais pas, j’aurais bien aimé, mais on refuse de me vendre un billet parce que je suis un chien.

– Mais vous n’êtes pas un chien!

– J’ai tenté de leur expliquer, mais ils ne me croient pas. Allez tenter de leur expliquer, vous.

– Je ne peux pas je suis une chienne. »

 

 

Exercice de sexisme (exercice de misanthropie… oui, encore!)

« Qu’avez-vous fait pour lui nuire?

– Je lui ai présenté celle qui est devenue sa femme. Et vous?

– Je suis devenu son ami et lui ai fait croire qu’il fallait tenir bon, que dans la vie tout finit par aller toujours mieux.

– Il mérite bien tous ces malheurs! Allons, pourquoi n’irions-nous pas l’inciter à s’intéresser à la politique? Après tout, nous allons voir jusqu’à quel point il peut être pitoyable et ridicule.

– Une excellente idée, mon cher! Mais avant cela passons chez une amie, Miss L., je vous verrais bien lui passer la bague au doigt.

– J’aurais préféré que nous passions chez la diseuse de bonne aventure pour qu’elle vous tire les cartes, elle promet toujours des avenirs radieux dignes de contes de fées.

– Vous êtes un démon!

– Disons que nous vivons tous en Enfer… »

***

« Ca se pomponne, ça se parfume, ça fait attention à son allure, ça prête oreille à ce que l’on dit de soi, ça s’occupe de mode, ça collectionne les tenues, et ça rabaisse l’autre sexe, pourtant ça se dit un mâle. Pour moi ce n’est rien d’autre qu’un pédéraste qui ne s’est pas encore avoué.

– Allons, miss Stiple, à ce compte là une femme qui agit à l’inverse serait saphique?

– Je ne sais pas. Oulala, si l’on ne peut plus édicter de postulat sans devoir développer, moi je préfère ne plus ouvrir la bouche.

– Ce serait dommage parce que vos aphorismes ne sont pas souvent faux.

– J’ai dit que je n’allais plus ouvrir la bouche, cela ne m’empêchera pas d’écrire. Réfléchissez un peu! Ne plus avoir à se perdre en rhétorique : fragmenter, aphoriser, sophistiser… Tiens, j’y pense, est-ce que le sophistiqué a rapport avec le sophisme? »

***

… Et parce qu’au bout du compte tout le monde est dans la même basse-cour :

CANNIBAL, n. A gastronome of the old school who preserves the simple tastes and adheres to the natural diet of the pre-pork period.

 

Hein? Je ne voye pas ce que vous disez

« Je ne vois en Laura Bridgman qu’un individu qui a eu l’audace d’incarner la condition humaine. Combien ont tant osé vraiment devenir ce qu’ils étaient : sourds, aveugles et muets?

– Hein? Je ne voye pas ce que vous disez. Moi j’suis pas aveugle, ni sourd, ni muet; je suis comme les autres : meilleur que tous. »

 

 i am blind, waiting in line

***

« Avez-vous remarqué qu’elle porte une alliance? Il a bien de la chance celui qui épouse une femme qui ne peut voir son visage ni entendre ses inepties, ni même en vocaliser elle-même.

– Comme un animal empaillé, mais qui ferait la cuisine.

– Et qui vide et lave le pot de chambre!

– Oh, mon vieux, il faut que je me trouve une aveugle, sourde et muette moi aussi.

– En effet, car votre autruche empaillée me dépite et votre épouse commence à me fatiguer; c’est qu’il n’y a pas que vous qu’elle ennuie, moi qui suis son amant je…

– Plait-il?! »

 

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